À la sortie du tribunal correctionnel de Reims, l’avocat des parties civiles salue une décision exemplaire contre la fraude au faux champagne. ©Sophie Bracquemart l’Union
✍️ Par l’Intersyndicat CGT du champagne
📅 Publié le 15 septembre 2025
⏱️Temps de lecture 7 minutes
En condamnant lourdement Didier Chopin et son épouse pour avoir inondé les marchés de fausses bouteilles de champagne, le tribunal correctionnel de Reims a envoyé un message clair : l’appellation Champagne n’est pas à galvauder ni à falsifier. Au-delà du scandale, cette décision vient rétablir la vérité et protéger la dignité des salariés de la filière. La CGT Champagne, qui s’était constituée partie civile, a vu sa demande reconnue par le tribunal au titre du préjudice causé aux salariés de toute la profession. Cette affaire n’aurait toutefois jamais éclaté sans les révélations d’une salariée sur les pratiques frauduleuses mises au grand jour.
Une fraude massive qui éclabousse l’image du Champagne
Entre 2022 et 2023, la société Chopin a élaboré et commercialisé entre 500 000 et 600 000 bouteilles de faux champagne. Derrière des étiquettes flatteuses, il ne s’agissait en réalité que d’un assemblage de vins ordinaires — parfois venus d’Espagne — gazéifiés artificiellement, une sorte de « Sodastream de luxe » qui trompait grossièrement les consommateurs et portait atteinte à la réputation mondiale du roi des vins.
Pour mémoire, le scandale a éclaté suite au signalement d’une salariée de la société Chopin, responsable du site de Billy-sur-Aisne, qui a dénoncé en 2023 la fabrication de fausses bouteilles de champagne. Ses alertes, relayées aux douanes, à la DREETS et à la presse, ont permis de révéler l’ampleur de la supercherie. L’enquête a ensuite confirmé que des centaines de milliers de bouteilles avaient déjà circulé sur le marché français, notamment dans certaines grandes surfaces, et que des volumes étaient destinés à l’export, risquant de discréditer le label Champagne dans le monde entier.
Une fraude massive qui éclabousse l’image du Champagne
Entre 2022 et 2023, la société Chopin a élaboré et commercialisé entre 500 000 et 600 000 bouteilles de faux champagne. Derrière des étiquettes flatteuses, il ne s’agissait en réalité que d’un assemblage de vins ordinaires — parfois venus d’Espagne — gazéifiés artificiellement, une sorte de « Sodastream de luxe » qui trompait grossièrement les consommateurs et portait atteinte à la réputation mondiale du roi des vins.
Pour mémoire, le scandale a éclaté suite au signalement d’une salariée de la société Chopin, responsable du site de Billy-sur-Aisne, qui a dénoncé en 2023 la fabrication de fausses bouteilles de champagne. Ses alertes, relayées aux douanes, à la DREETS et à la presse, ont permis de révéler l’ampleur de la supercherie. L’enquête a ensuite confirmé que des centaines de milliers de bouteilles avaient déjà circulé sur le marché français, notamment dans certaines grandes surfaces, et que des volumes étaient destinés à l’export, risquant de discréditer le label Champagne dans le monde entier.
Des condamnations exemplaires
Le 2 septembre 2025, le tribunal correctionnel de Reims a rendu son jugement :
- Didier Chopin, 56 ans, a été condamné à 4 ans de prison dont 18 mois ferme, à une amende de 100 000 euros, ainsi qu’à une inéligibilité de 15 ans et à une interdiction de gérer ou d’exercer dans la filière champagne pendant 5 ans.
- Karine Chopin-Faye, son épouse, a écopé de 2 ans avec sursis, de la même amende de 100 000 euros, d’une inéligibilité de 15 ans et des mêmes interdictions professionnelles.
- La SAS Chopin a été condamnée à une amende de 300 000 euros, en plus de la confiscation et de la destruction des stocks frauduleux.
À ces sanctions s’ajoutent de lourds dommages et intérêts au bénéfice des parties civiles : 1,5 million d’euros à la Scapest (centrale d’achats Leclerc), 500 000 euros au Comité Champagne (CIVC), 100 000 euros à la SAS GM Distribution, et 10 000 euros à l’INAO.
Ces condamnations, saluées par de nombreux observateurs comme « exemplaires », viennent rappeler que la justice peut se montrer ferme lorsque c’est l’intégrité d’une appellation aussi prestigieuse que le champagne qui est menacée.
La CGT Champagne reconnue partie civile
La CGT Champagne s’était également constituée partie civile dans cette affaire. Le tribunal a retenu cette demande, considérant que la fraude ne portait pas seulement atteinte à l’appellation mais aussi à l’intérêt collectif des salariés de la profession.
En effet, chaque scandale autour du faux champagne ternit l’image d’un produit construit par le travail patient des vignerons, des ouvriers de cave, des saisonniers et de l’ensemble des salariés de la filière. Cette affaire est venue salir leurs efforts et fragiliser leur crédibilité sur les marchés, pouvant avoir des conséquences directes sur l’emploi et sur la confiance des consommateurs.
En reconnaissant le rôle de la CGT Champagne, la justice a donc affirmé que la défense de l’appellation ne peut être dissociée de la défense des travailleuses et travailleurs qui la font vivre au quotidien.
Le rôle décisif d’une salariée
Au cœur du dossier, une ancienne responsable du site de Billy-sur-Aisne, salariée de la société Chopin, a déclenché l’enquête par ses signalements. Dès avril 2023, elle alerte ses collègues en interne puis transmet des informations aux douanes, à la brigade vins & spiritueux de la DREETS et, finalement, à la presse. C’est cette démarche courageuse qui mettra à jour l’ampleur de la fraude et conduira à l’ouverture de l’instruction judiciaire.
Pourtant, malgré ce rôle essentiel, elle n’a pas été reconnue lanceuse d’alerte par la juridiction prud’homale, au motif qu’elle n’aurait pas respecté les canaux définis par la loi. Le tribunal correctionnel de Reims, lors du procès, a lui aussi écarté la qualification de lanceuse d’alerte, estimant que cette question relevait du conseil de prud’hommes. La salariée poursuit aujourd’hui ses recours pour faire reconnaître son statut.
Son témoignage et son action rappellent combien il est difficile, dans la filière comme ailleurs, de dénoncer des pratiques illégales quand on en est le témoin direct. Mais son rôle restera dans les faits : c’est suite à son alerte que l’affaire a éclaté.
Recours et procédures en cours
Si le jugement du 2 septembre a marqué un tournant, l’affaire Chopin est loin d’être terminée. Dès le 4 septembre, Didier Chopin a décidé, par l’intermédiaire de son avocat Me Francis Fossier, d’interjeter appel. Non pas pour contester sa responsabilité, mais pour demander plus de clémence, notamment la suppression de la partie ferme de sa peine, jugée plus sévère que les réquisitions du parquet.
Parallèlement, d’autres procédures sont engagées. Les douanes poursuivent Didier Chopin, avec un procès prévu le 4 février 2026. Son ancienne salariée, Ludivine Jeanmingin, a saisi le conseil de prud’hommes pour réclamer des dommages et intérêts, estimant avoir subi un préjudice dans cette affaire et continuant de se battre pour la reconnaissance de son statut de lanceuse d’alerte. Enfin, une procédure pour agressions sexuelles est également ouverte à l’encontre de Chopin, ce que son avocat conteste fermement.
Dans la presse, l’avocat a dressé le portrait d’un homme ruiné, malade et déprimé, désormais réduit au RSA, vivant chez sa mère et cherchant un emploi. Il l’a qualifié de « délinquant de circonstance », expliquant qu’il aurait agi non pour s’enrichir mais pour honorer des contrats passés à des prix intenables. Des propos qui tranchent avec la sévérité du jugement rendu à Reims et qui révèlent une bataille judiciaire encore ouverte.
Un enjeu de crédibilité mondiale
Le champagne n’est pas un vin comme un autre. Il est un symbole de la France dans le monde, un produit de fête et de prestige qui doit sa réputation à une rigueur de production stricte, protégée par l’appellation d’origine contrôlée (AOC).
Chaque fraude vient fissurer ce prestige, donnant aux concurrents étrangers un argument facile pour attaquer l’authenticité et justifier leurs propres contrefaçons. Comme l’ont rappelé plusieurs professionnels à l’issue du procès, cette décision vient « faire le ménage » et réaffirmer que le champagne ne peut pas être traité comme un vulgaire soda gazéifié.
Un avertissement pour l’avenir
L’affaire Didier Chopin ne doit pas être considérée comme un simple épisode judiciaire, mais comme un avertissement pour l’ensemble de la filière. Les professionnels doivent tirer les leçons de ce scandale : la tentation de profits faciles par la tricherie est une impasse qui détruit à la fois la réputation du champagne et la confiance des consommateurs.
La CGT Champagne insiste sur la nécessité de renforcer les contrôles, de protéger les appellations et d’associer pleinement les salariés à cette vigilance. Car ils font partie de ceux qui, au quotidien, garantissent la qualité et l’authenticité du produit.
Conclusion
Ce procès restera dans les annales comme l’un des plus lourds de l’histoire récente du champagne. Par la sévérité de ses condamnations, le tribunal de Reims a réaffirmé que l’appellation Champagne doit demeurer synonyme d’authenticité et bénéficier d’une protection exemplaire.
La reconnaissance du rôle de la CGT Champagne comme partie civile constitue un signal fort : défendre le champagne, c’est aussi défendre celles et ceux qui le produisent. Et si cette fraude a pu être stoppée, que les tribunaux le reconnaisse ou non, c’est aussi grâce au lancement de l’alerte d’une salariée qui, malgré les obstacles, a décidé de parler.
Sources :
- L’Union – « Affaire du faux champagne : prison ferme pour Didier Chopin » (03 septembre 2025)
- Le Monde – « Un vigneron condamné à dix-huit mois de prison ferme pour avoir vendu du faux champagne » (02 septembre 2025)
- La Dépêche – « Faux champagne fabriqué avec des vins d’Espagne : un vigneron condamné à 4 ans de prison » (02 septembre 2025)
- TF1 Info – « Vigneron condamné pour avoir produit du faux champagne : les professionnels saluent une décision exemplaire » (03 septembre 2025)
- L’Union – « Didier Chopin n’est qu’un délinquant de circonstance selon son avocat » (13 septembre 2025)
- L’Union – « Depuis le début j’ai dû prouver ce que je disais » (septembre 2025)