La caravane des vendanges en maraude à Nesle-le-Repons. © Photo : La CGT champagne.
Chaque année depuis la vendange 2018 et la révélation de l’affaire de traite d’humains à Oiry, l’UD CGT de la Marne sillonne le vignoble marnais pour informer les saisonniers sur leurs salaires et leurs droits. Cette année, l’Intersyndicat CGT du champagne les a rejoints pour effectuer des maraudes dans les galipes.
Doté de deux véhicules, dont un est clairement identifié car estampillé aux couleurs pétantes de la CGT, une douzaine de militants sont allés à la rencontre des saisonniers sur le terrain accompagnés par de nombreux journalistes désireux de se plonger en immersion totale dans l’ambiance si particulière des vendanges, surtout ces dernières années : France info, l’Humanité, The Guardian, l’Agence France Presse (AFP), des journalistes indépendants pour le compte du journal numérique Basta et Libération, sans oublier l’équipe télé de FR3 Champagne Ardenne.
Une semaine durant, cette douzaine de militants a parcouru les vignobles de plus d’une vingtaine de villages : Cumières, Damery, Mardeuil, Avize, Le Mesnil sur Oger, Oger, Vinay, Saint Martin d’Ablois, Mancy, Grauves, Hautvillers, Dizy, Aÿ, Mareuil sur Aÿ, Avenay val d’or, Igny Comblizy, Nesle le repons, Troissy, Vauciennes, Boursault, Oeuilly, Rilly la montagne, Mailly champagne…
Les journées à l’organisation bien rodée commencent d’abord le matin par un petit débrief autour d’un café, puis par la visite de vignoble suivi d’une pause déjeuner ; reprise de la maraude dans d’autres vignobles l’après-midi et finissent par un petit débrief de la journée à l’UL d’Epernay.
Malgré la surprise de voir arriver cette caravane aux couleurs de la CGT, les militants sont plutôt bien accueillis par les équipes de vendangeurs, souvent étrangers, auxquels ils ont distribué de nombreux articles publicitaires (sacs, teeshirts…) et plusieurs milliers de tracts traduits en 8 langues différentes. Paradoxalement, il ressort des échanges avec les vendangeurs que pratiquement tous les saisonniers disent avoir un contrat de travail mais ne savent pas combien ils seront payés, ni que le temps de transport de leur hébergement à la vigne doit être rémunéré par l’employeur.
Malheureusement, on ne peut pas en dire autant concernant l’accueil de certains encadrants des ” hordons ” de vendangeurs ou plus encore par les sbires envoyés par certains prestataires prévenus avant même l’arrivée de la caravane. Ce fut notamment le cas à Mancy où les équipes de la caravane ont repéré des tentes bien cachées sous le hangar d’un viticulteur. Ce dernier, prévenu par téléphone portable par un collègue venant de croiser les véhicules de la CGT, est sorti en proférant des insultes : “Bandes de bâtards, on vous retrouvera”. Ce campement illégal est aussitôt signalé à l’inspection du travail qui, arrivée sur place quelques heures après, n’a rien pu constater car les tentes avaient été démontées entre-temps.
Au cours de leurs visites les militants ont également découvert la présence d’autres campements illégaux sur la quasi-totalité des communes, bien cachés dans des vergers ou des bois environnants, notamment à Avize ou à la sortie de Mareil sur Aÿ. Sur ce terrain mis à la disposition de vendangeurs Tchèques par une grande maison de champagne, ayant pignon sur rue, sont plantées une dizaine de tentes. Il a été déposé une cuve d’eau en plastique ainsi que deux toilettes de chantier pour assurer un minimum d’hygiène aux campeurs. Bizarrement, lorsque la caravane est repassée en fin de semaine pour montrer ce campement illégal aux journalistes qui les accompagnaient, ils ont trouvé place nette. Toutes les tentes avaient disparues. Il ne restait que la cuve d’eau et les toilettes pour témoigner de la présence récente des occupants. L’inspection du travail est elle intervenue entre temps pour faire cesser ce trouble ?…
L’intersyndicat CGT du champagne et de l’Union Départementale CGT de la Marne joue un rôle essentiel en tant que lanceur d’alerte, dénonçant les abus dont sont victimes ces travailleurs saisonniers. C’est bien grâce à l’action de l’intersyndicat CGT du champagne et des structures départementales de la CGT, accompagnés par des journalistes, que tous ces abus sont relayés dans la presse écrite et télévisée par nombres de médias français, voire internationaux, notamment dans le journal télévisé de France 3 Champagne Ardennes du 19/20 heures du jeudi 19 septembre dernier, dont vous verrez l’extrait dans la vidéo ci-dessous
Par ces actions, la CGT met également en lumière le silence contraint de nombreux travailleurs, souvent paralysés par la peur des représailles. Le syndicat se bat pour briser cette omerta en encourageant les travailleurs à s’organiser, à dénoncer les abus et à exiger des conditions de travail dignes et des salaires payés au minimum légal.
L’action de la CGT dans la Marne est donc déterminante pour combattre l’exploitation des saisonniers, en donnant une voix à ceux qui sont souvent réduits au silence, en luttant contre l’impunité des employeurs, donneurs d’ordres et prestataires de services sans scrupules, et en pesant fortement sur la réforme en profondeur des conditions de travail et d’hébergement dans les vignes de Champagne présentée en juin dernier par la filière dans le cadre de sa campagne “Ensemble pour la Vendange en Champagne”.
Déterminés à ne rien lâcher, le combat mené par l’intersyndicat CGT du champagne et l’UD CGT du 51 contre ces conditions d’hébergement indignes, illégales et ces salaires de misère (jusqu’à 30 € par jour seulement) est un exemple fort de solidarité syndicale et de défense des droits humains.