Lors de la formation à Aÿ-Champagne, les élus de la CGT Champagne échangent sur les signaux d’alerte de la souffrance militante. Un temps de parole libéré, collectif et salutaire © CGT champagne

✍️ Par l’Intersyndicat CGT du champagne

📅 Publié le 13 juin 2025

⏱️Temps de lecture 3 minutes

Trop souvent invisibles, les souffrances des élus du personnel sont réelles. Entre surcharge, isolement et sentiment d’impuissance, leur engagement peut les user jusqu’au burn-out. Pendant deux jours, à Aÿ-Champagne, près de 80 militants de la CGT Champagne se sont réunis pour mettre des mots sur ces maux, se former pour y faire face… et mieux repartir au combat. Récit d’une formation salutaire, utile et humaine.

Deux jours pour dire ce qu’on ne dit jamais

Les 11 et 12 juin 2025, la salle des fêtes d’Aÿ a vibré au rythme d’une formation syndicale pas comme les autres. Organisée par la commission formation de l’Intersyndicat CGT du Champagne, elle a rassemblé près de 80 élus venus de nombreuses maisons de champagne. Le thème ? La souffrance des élus et comment y faire face.

Souvent concentrés sur la défense des autres, les représentants du personnel négligent leur propre santé. Écoute des salariés en détresse, confrontations tendues avec les directions, surcharge de responsabilités, manque de reconnaissance, horaires envahissants, solitude militante : tout cela peut mener à l’usure. Cette formation, animée par Christelle Pernette, intervenante du cabinet Groupe 3E, a permis de sortir du silence et de regarder en face un phénomène encore trop tabou : le burn-out militant.

Prendre conscience, poser des mots, retrouver des forces

À travers des temps d’échanges, des apports théoriques et des exemples concrets, les élus ont pu identifier les trois grandes sources de tension dans leur engagement : la relation avec la direction, le lien avec les salariés, et toutes les tâches invisibles mais essentielles qui s’accumulent en coulisse. À cela s’ajoutent les risques psychosociaux bien connus dans le monde du travail — surcharge, pression émotionnelle, conflits de valeurs, isolement — mais rarement appliqués au cas des élus.

Cette formation a clairement démontrée la double posture difficile du représentant : salarié parmi les autres, mais aussi porte-parole, défenseur, médiateur, et parfois bouc émissaire. Une charge mentale et émotionnelle que beaucoup assument sans filet, au prix de leur santé ou de leur équilibre personnel. À travers ces deux journées, chacun a pu reprendre conscience de ses limites, de ses droits, et surtout de la nécessité de ne pas rester seul.

Une dynamique collective et conviviale

Au-delà des apports théoriques, la formation a été l’occasion d’un moment rare de ressourcement collectif. Les discussions, les pauses partagées, l’apéritif et le repas en fin de formation ont nourri un climat de solidarité et de convivialité. À une époque où le militantisme peut parfois isoler, cette rencontre a rappelé l’importance de se retrouver, de parler vrai, de se soutenir — et de penser le syndicalisme comme une aventure humaine.

Transmettre l’histoire et renforcer l’avenir

La seconde journée s’est clôturée par la présentation du livre de Bernard Beaulieu, La Champagne au corps. Ancien secrétaire général de l’Intersyndicat CGT du Champagne, Bernard y retrace son parcours militant et les luttes collectives qui ont façonné la région. En offrant ce témoignage à la nouvelle génération d’élus, l’Intersyndicat affirme une continuité précieuse : celle d’un engagement combatif mais aussi réfléchi, enraciné dans une histoire collective riche et lucide.

Un engagement à préserver, un syndicalisme à renforcer

En plaçant la question de la souffrance des élus au centre d’une formation syndicale, l’Intersyndicat CGT du Champagne ouvre un chemin trop souvent ignoré : celui de la prévention, de la reconnaissance et du soin mutuel entre élus. Car préserver les militants, c’est préserver la force du syndicat. C’est refuser que les plus investis soient les plus exposés. Et c’est rappeler que l’on ne peut pas être au service des autres sans prendre soin de soi.

Ces deux journées n’ont pas tout résolu. Mais elles ont posé les bonnes questions, redonné de l’élan, et renforcé des liens. Ce n’est pas rien. C’est même essentiel pour continuer à lutter ensemble, longtemps, et en pleine conscience.