Derrière la vitrine européenne, les laboratoires français en ruine. Une politique de communication qui masque le sacrifice du service public de la recherche. © Gonzalo Fuentes / POOL / AFP

✍️ Par l’Intersyndicat CGT du champagne

📅 Publié le 12 mai 2025

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Ils déroulent le tapis rouge aux chercheurs américains, ils promettent des millions pour attirer les « talents » venus d’ailleurs… mais que reste-t-il pour celles et ceux qui font vivre la recherche en France ? Salaires bloqués, précarité qui explose, budgets en chute libre, bâtiments délabrés, équipes en sous-effectif…

Pendant que Macron soigne son image à Bruxelles et dans les médias, les laboratoires français meurent à petit feu. Un article à lire sans attendre pour comprendre ce que cache vraiment cette opération de communication gouvernementale.

Le tapis rouge… pour masquer la misère scientifique française

Le 5 mai 2025, à la Sorbonne, Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen déroulaient le tapis rouge aux chercheurs américains victimes des coupes budgétaires et du climat réactionnaire sous Trump. Avec une annonce tonitruante : une enveloppe de 600 millions d’euros pour faire de l’Europe, et donc de la France, « un pôle mondial de la science libre ».

Mais derrière le discours, la réalité est autrement plus brutale. À l’Ifremer en Bretagne, les bâtiments tombent en ruine, les chercheurs démissionnent, les postes disparaissent, et l’établissement est menacé de cessation de paiement d’ici 2028. Le rapport Syndex de mars 2025 est sans appel : déficit structurel, effectifs en baisse, flotte scientifique à l’abandon.

Pendant que les chercheurs français doivent se contenter de salaires avoisinant 2 500 à 3 000 euros brut par mois, soit 30 000 à 36 000 euros brut par an, le gouvernement ose promettre 300 000 euros par an, soit entre 5 000 et 6 000 euros par mois, pour chaque chercheur américain accueilli. Une indécence que dénonce la CGT-SNTRS, relayée dans La Vie Ouvrière.

Une recherche française dépecée et précarisée

Mediapart le souligne : ce grand raout parisien n’est rien d’autre qu’une « opération Potemkine ». Car, dans le même temps, le gouvernement Macron supprime 400 millions d’euros au budget de la recherche par décret, après une première coupe d’un milliard d’euros en début d’année. Le tout dans un pays où l’investissement dans la recherche plafonne à 2,2 % du PIB, bien loin des 3 % promis depuis des années.

Ce constat est partagé par L’Humanité, qui, fidèle à sa ligne éditoriale engagée, alerte depuis des années sur la précarisation de la recherche publique, les coupes budgétaires dans l’enseignement supérieur, et les conditions de travail dégradées des personnels scientifiques. Le journal met en lumière les contradictions criantes entre les annonces grandiloquentes du gouvernement et la réalité quotidienne des laboratoires et des universités, victimes d’un sous-financement chronique et d’une politique d’austérité dissimulée derrière des slogans européens.

La précarité explose : plus d’un tiers des personnels de la recherche sont désormais contractuels. Les CDI de mission se généralisent, les financements sont de plus en plus soumis à la compétition entre laboratoires, les regroupements forcés étouffent les équipes, et la liberté académique est régulièrement attaquée.

À la clé, des chercheurs français qui passent plus de temps à chercher des financements qu’à faire avancer la science.

Une hypocrisie d’État dénoncée par les syndicats

L’intersyndicale ne s’y trompe pas : ce n’est pas l’accueil de chercheurs étrangers qui est en cause, mais bien le cynisme du gouvernement qui préfère jouer la carte de la vitrine internationale plutôt que d’investir sérieusement dans son propre système de recherche publique.

En France, les salaires sont trois fois inférieurs à ceux pratiqués en Allemagne, les infrastructures se dégradent, et les conditions de travail se détériorent chaque année. Le tout pendant que le gouvernement ose fanfaronner sur sa capacité à accueillir les cerveaux du monde entier.

Une autre politique est possible

La CGT, avec les autres syndicats du secteur, appelle à une véritable politique publique de la recherche, qui commence par un plan massif de rattrapage budgétaire, la titularisation des personnels précaires, la revalorisation des salaires, et le respect des libertés académiques.

Car sans moyens pour toutes et tous, il n’y aura pas de science d’avenir, ni pour les chercheurs français, ni pour les chercheurs étrangers persécutés dans leur pays. L’excellence ne se décrète pas dans les salons de l’Élysée, elle se construit sur le terrain, par un financement pérenne, équitable et ambitieux de la recherche publique.

Sources :