Ils étaient une quarantaine, venus de Paris jusqu’au tribunal de Châlons, pour défendre leurs droits et exiger justice. © Stéphanie Jayet
✍️ Par l’Intersyndicat CGT du champagne
📅 Publié le 31 mars 2025
⏱ Temps de lecture 4 mn
En Champagne, derrière les bulles et le prestige, c’est l’odeur de l’exploitation qui flotte dans l’air. 57 vendangeurs sans papiers, privés de droits, de salaires et de dignité, osent aujourd’hui se lever et réclamer justice. Et à leurs côtés, la CGT Champagne ne lâche rien. Plongez dans cette affaire qui secoue le vignoble et démasque l’envers du décor.
Champagne : la misère se reflète dans les bulles du vin des rois et du roi des vins
Ils étaient plus de cinquante, entassés dans une maison insalubre de Nesles-le-Repons. Originaires d’Afrique de l’Ouest, sans contrat, sans salaire, sans papiers, ils ont été recrutés en région parisienne et convoyés comme du bétail jusqu’au vignoble de Champagne, pour vendanger dans des conditions indignes. Nourris de riz ou de sandwichs avariés, dormant à même le sol dans une promiscuité révoltante, ces hommes ont été victimes d’une véritable traite d’êtres humains.
L’affaire éclate en septembre 2023 grâce à un simple signalement de nuisances sonores. Ce que découvrent alors les gendarmes dépasse l’imaginable : un réseau d’exploitation parfaitement huilé, impliquant une prestataire de services sans scrupules, deux intermédiaires et un viticulteur champenois. La justice parle de « traite d’êtres humains envers personnes vulnérables », un crime passible de 7 ans de prison. Mais derrière les barreaux, ce sont les vendangeurs que l’on trouve encore aujourd’hui enfermés dans la précarité.
Une mobilisation exemplaire, portée par la CGT
Dès les premières révélations, la CGT Champagne, avec la FNAF CGT, l’UD CGT 51 et d’autres organes du syndicat, s’est dressée en première ligne pour soutenir les victimes, les aider à se constituer partie civile et faire de ce scandale une tribune pour dénoncer des pratiques que nous savons bien loin d’être isolées. Chaque année, des centaines de travailleurs précaires, étrangers et invisibles, sont livrés à l’exploitation dans les vignes champenoises.
Le 26 mars, ils étaient plus de 40 à faire le déplacement depuis Paris jusqu’au tribunal de Châlons-en-Champagne, dans un bus affrété par la CGT. Ce procès, ils l’attendaient depuis plus d’un an. Malgré la décision de renvoyer l’affaire au 19 juin à la demande de la défense, leur détermination reste intacte. « On ne lâchera rien », martèlent-ils, et la CGT est là pour que cette promesse tienne.
Quand la justice recule, la lutte avance
La CGT l’a dit et répété : il ne s’agit pas simplement de travail dissimulé. Il s’agit de traite d’êtres humains. Et il est hors de question de laisser requalifier les faits pour les minimiser. L’enjeu est double : que justice soit rendue aux travailleurs exploités, et que des titres de séjour leur soient délivrés pour sortir de la spirale de vulnérabilité. Car c’est aussi cela, le combat syndical : défendre les droits, la dignité et l’égalité, même – et surtout – quand l’État se tait.
Ce combat, nous allons le porter jusqu’au bout. Rendez-vous le 19 juin. En attendant, faisons du bruit, faisons connaître cette affaire, et faisons trembler ceux qui exploitent dans l’ombre les ouvriers viticoles, tout en vendant du champagne à prix d’or.
Pour aller plus loin :
Le monde – [En Champagne un procès révèle le sort de vendangeurs sans papiers sans contrat ni salaire]
L’UNION – [L’affaire des « vendanges de la honte » renvoyée en juin]