Michel Barnier, désigné Premier ministre par le président de la République, a présenté le 21 septembre son choix de gouvernement. © Photo(s) : STEPHANE DE SAKUTIN / POOL / AFP

Dans cet article paru le 23 septembre 2024 dans les rubriques numĂ©riques de la ” Vie Ouvrière”, organe de presse de la CGT, la centrale syndicale exprime clairement sa vive indignation face Ă  la composition du gouvernement Barnier et aux orientations politiques qu’il incarne.

 Pour la CGT, ce nouveau gouvernement marque un virage encore plus prononcé vers la droite, trahissant le résultat des élections législatives où la coalition de gauche était arrivée en tête. Elle dénonce un mépris démocratique manifeste, Emmanuel Macron ayant imposé Michel Barnier comme Premier ministre malgré les attentes populaires.

La confĂ©dĂ©ration CGT critique particulièrement la prĂ©sence de personnalitĂ©s très conservatrices et libĂ©rales Ă  des postes clĂ©s, dont l’engagement inquiète quant Ă  une politique de simplification qui cacherait des licenciements et une privatisation accrue des services publics. La CGT craint que ces nominations annoncent des rĂ©formes antisociales, en particulier la poursuite de la rĂ©forme des retraites et de la rĂ©munĂ©ration au mĂ©rite dans la fonction publique.

Sophie Binet, secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale de la CGT, rĂ©affirme son opposition Ă  ce gouvernement qu’elle accuse de vouloir imposer une politique d’austĂ©ritĂ©. Elle appelle Ă  la mobilisation le 1er octobre pour exiger l’abrogation de la rĂ©forme des retraites, la mise en place d’une fiscalitĂ© plus juste, notamment avec le rĂ©tablissement de l’ISF, et une vĂ©ritable confĂ©rence sur le financement des pensions. Pour la CGT, le rapport de force est dĂ©sormais en faveur des syndicats, et l’heure est Ă  l’unitĂ© pour dĂ©fendre les droits sociaux et Ă©conomiques des travailleurs face Ă  ce gouvernement rĂ©actionnaire.

L’Intersyndicat CGT du champagne

23 septembre 2024 | Mise Ă  jour le 24 septembre 2024
Par  | Photo(s) : STEPHANE DE SAKUTIN / POOL / AFP

Onze semaines après la tenue des lĂ©gislatives qui a vu la coalition de gauche arriver en tĂŞte des Ă©lections, le Premier ministre Michel Barnier, dĂ©signĂ© par le prĂ©sident de la RĂ©publique, a prĂ©sentĂ© le 21 septembre son choix de gouvernement. Sans surprise, c’est un gouvernement de droite aux antipodes du rĂ©sultat sorti des urnes qu’impose aux Français le nouveau locataire de Matignon.

Non content de distribuer l’essentiel des postes ministĂ©riels Ă  des personnalitĂ©s du groupe Les RĂ©publicains et du camp macroniste, Michel Barnier engage avec ce nouveau gouvernement un virage Ă  droite de la droite aux vieux relents fillonistes et Manif pour tous, avec au casting des figures politiques très droitières, conservatrices et rĂ©actionnaires. Majoritairement soutiens de la « rĂ©forme » des retraites, plusieurs ministres nouvellement en poste se sont par ailleurs opposĂ©s Ă  la constitutionnalisation du droit Ă  l’IVG, contre les droits des personnes trans ou en adversaire du mariage pour tous.

Simplifier Ă  tous les Ă©tages

C’est le cas notamment de la RĂ©publicaine Laurence Garnier, un temps envisagĂ©e comme Ministre de la famille, puis recasĂ©e finalement au ministère dĂ©lĂ©guĂ© Ă  la consommation. Plus prĂ©occupant encore est la nomination de secrĂ©taire d’Etat en charge de la citoyennetĂ© et de la lutte contre les discriminations, Othman Nasrou, un proche de ValĂ©rie PĂ©cresse qui s’Ă©tait publiquement opposĂ© Ă  l’ouverture du droit au mariage pour les couples homosexuels.

Sur le plan social, les profils des ministres fraĂ®chement nommĂ©s inquiètent particulièrement les syndicats. Anciennement ministre du logement, le macroniste et très libĂ©ral Guillaume Kasbarian, artisan de la loi anti-squatteurs (rebaptisĂ©e loi anti-pauvres par les associations) s’est positionnĂ© dès sa nomination sur X en dĂ©clarant vouloir « simplifier Ă  tous les Ă©tages ».« Il a fait une grande Ă©cole de commerce et vient des cabinets conseil. On se doute que quand il dit « simplifier », ça veut dire licencier. Et sa rĂ©ponse aux besoins des populations dans les territoires ça va ĂŞtre plus d’entreprises privĂ©es, et pas des personnels sous statut », prĂ©vient Aamar Yazid, animateur du pĂ´le communication de la fĂ©dĂ©ration CGT des services publics, inquiète de la poursuite de la rĂ©forme initiĂ©e par Stanislas GuĂ©rini, qui devait introduire plus de rĂ©munĂ©ration au mĂ©rite dans la fonction publique. « La rĂ©forme de GuĂ©rini qu’on croyait enterrĂ©e, il va la mener en pire », juge le syndicaliste.

Erreur de casting

Du cĂ´tĂ© de l’Education nationale, la nomination d’une novice Ă  la tĂŞte du ministère a immĂ©diatement Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©e par les organisations syndicales d’enseignants comme « une erreur de casting ». « Anne Genetet n’a ni expĂ©rience ni expertise, elle est imposĂ©e par la Macronie. ça nous inquiète Ă©normĂ©ment, dans un contexte oĂą l’Education nationale est Ă  bout de souffle », fustige Isabelle Vuillet, co-secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale de la CGT Educ-Action. Cinquième  ministre en deux ans, Anne Genetet hĂ©rite d’un ministère en crise ayant subi rĂ©forme sur rĂ©forme, dont la dernière en date, « le choc des savoirs », est particulièrement contestĂ©e par le corps enseignant qui y voit un tri social des Ă©lèves. CĂ´tĂ© inclusion, l’hĂ©ritage des Jeux paralympiques et les grandes promesses faites par Macron sur le handicap se sont dĂ©jĂ  envolĂ©es, aucun ministère dĂ©lĂ©guĂ© ou secrĂ©tariat d’Etat n’ayant Ă©tĂ© nommĂ© sur le sujet.

Ligne dure et austéritaire

Enfin, la nomination au poste de ministre de l’IntĂ©rieur du très conservateur patron des sĂ©nateurs LR, le vendĂ©en Bruno Retailleau, Ă  la manĹ“uvre l’automne dernier pour durcir la loi Immigration, engage le gouvernement dans une ligne dure. En refusant le principe d’une cohabitation avec la gauche arrivĂ©e en tĂŞte des suffrages, et en proposant un premier Ministre adoubĂ© par l’extrĂŞme-droite, Emmanuel Macron bafoue non seulement les institutions dont il est censĂ© ĂŞtre le garant mais creuse un peu plus le sillon d’une dĂ©rive dĂ©mocratique qui a caractĂ©risĂ© ses deux mandatures.

Sous pression, le premier Ministre Michel Barnier va quant Ă  lui devoir boucler un budget de crise en un temps record. PositionnĂ© sur une ligne dure et austĂ©ritaire, dans la lignĂ©e de ses prĂ©dĂ©cesseurs, il a dĂ©jĂ  fait savoir qu’il mènerait une politique drastique de coupes budgĂ©taires tout en Ă©pargnant les entreprises et sans hausses d’impĂ´ts qualifiĂ©es de « maladie française », laissant planer un sĂ©rieux doute sur sa volontĂ© de faire que les plus riches prennent rĂ©ellement leur part dans l’effort de solidaritĂ©. InterrogĂ© le soir du 22 septembre sur le plateau de France 2 Ă  propos de la rĂ©forme des retraites, il s’est dit par ailleurs ouvert Ă  une « amĂ©lioration » du dispositif : « Je veux faire confiance aux partenaires sociaux pour amĂ©liorer cette loi » a-t-il dĂ©clarĂ©.

Mobilisation le 1 er octobre

InvitĂ©e le lendemain au micro de France Info, la secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale de la CGT Sophie Binet a rĂ©agi au projet de budget du gouvernement en appelant notamment au rĂ©tablissement de l’impĂ´t sur la fortune (ISF) et Ă  une plus grande taxation du capital. InterrogĂ©e sur l’appel Ă  la grève nationale lancĂ© par son syndicat le 1er octobre aux cĂ´tĂ©s de la FSU et de Solidaires, la leader de la CGT a de nouveau rĂ©clamĂ© l’abrogation de la rĂ©forme des retraites ainsi que la tenue d’une confĂ©rence (sur les pensions), «pour que les syndicats puissent prĂ©senter leurs propositions de financement », rappelant que « le rapport de force » Ă©tait dĂ©sormais du cĂ´tĂ© des syndicats.

Voire l’intĂ©gralitĂ© de l’interview de Sophie Binet dans la vidĂ©o ci-dessous :