Un employeur a-t-il le droit de supprimer une prime résultant d’un usage d’entreprise ?

Oui. L’employeur peut mettre fin à un usage d’entreprise qui instaure notamment une prime, mais attention, il y a une procédure à suivre.

Mais qu’est-ce qu’un usage d’entreprise ?

L’usage d’entreprise est un avantage accordé librement et de manière répétée par un employeur à ses salariés, sans que le code du travail, une convention ou un accord collectif ne l’impose. Tel est le cas par exemple pour une décision de l’employeur d’accorder un avantage aux salariés, actée dans un PV de CSE pour répondre à une demande des salariés formulée par les élus.

Pour être qualifié d’usage, l’avantage accordé par l’employeur rempli toutes les conditions suivantes :

  • Généralité, c’est-à-dire qu’il doit être accordé à tout le personnel ou au moins à une catégorie du personnel (ouvriers de la maintenance par exemple) ;
  • Constance, c’est-à-dire attribué régulièrement (une prime versée depuis plusieurs années par exemple)
  • Fixité, ce qui implique qu’il soit déterminé selon des règles précises (une prime dont le mode de calcul est défini et fixé à l’avance avec des critères objectifs par exemple)

Exemple :

une prime de fin d’année accordée à tout le personnel tous les ans depuis 5 ans est un usage d’entreprise.

Les avantages résultant d’un usage d’entreprise ont un caractère obligatoire pour l’employeur.

Il doit donc respecter la procédure de dénonciation. A défaut, l’usage continuera de s’appliquer.
Ainsi, pour qu’un usage soit valablement dénoncé, l’employeur doit :

  • informer les représentants du personnel dans un délai suffisant pour permettre d’éventuelles négociations ;
  • informer individuellement les salariés auxquels l’usage profite.

Attention

L’employeur ne peut pas supprimer un usage pour un motif illicite (représailles suite à une grève, sanction à caractère disciplinaire, etc.). Si c’est le cas, la procédure de dénonciation de l’usage sera nulle.

Informer les représentants du personnel :

L’information est donnée en réunion du comité social et économique, après inscription de la dénonciation à l’ordre du jour.

S’il n’existe pas de CSE dans votre entreprise, il suffit à l’employeur d’informer ses salariés. En revanche, si l’absence de représentants du personnel est due à une négligence de sa part, la procédure de dénonciation sera nulle.

Si l’employeur n’a pas organisé d’élections professionnelles alors que l’effectif de son entreprise l’y obligeait, vous devra organiser des élections avant de pouvoir dénoncer l’usage.

Lors de la dénonciation, les représentants du personnel pourront demander à l’employeur de négocier un accord pour compenser la suppression de l’usage : rien ne l’y oblige. Il n’y a aucune obligation pour qu’un accord se substitue à un usage.

Le fait que les représentants du personnel aient accepté cette dénonciation ne dispense l’employeur pas d’informer les salariés.

Si le CSE s’oppose à son projet, cela n’empêchera l’employeur pas de supprimer l’usage.

Informer individuellement chaque salarié concerné par la dénonciation :

L’employeur n’a pas à obtenir l’accord des salariés pour dénoncer un usage, sauf s’il s’agit d’une disposition figurant dans leur contrat de travail.

En revanche, l’employeur a l’obligation de les informer, soit par courrier remis en main propre contre décharge, soit par lettre recommandée avec accusé de réception.

Respecter un délai de prévenance :

Aucun délai n’est fixé par le droit du travail entre le moment où l’employeur informe les représentants du personnel et les salariés et celui où il supprime l’usage.

Selon les juges, le délai de prévenance doit être suffisant pour permettre d’éventuelles négociations. Cette appréciation se fera au cas par cas.

Exemple

Il a été jugé que :

  • le délai de prévenance est suffisant lorsque la dénonciation est communiquée au cours du mois de mai pour le versement d’une prime de 13e mois en décembre ;
  • le délai de prévenance est insuffisant lorsque la dénonciation a lieu le 1er avril pour un versement à la fin du mois.

A noter !

Le délai légal de dénonciation d’un accord collectif (3 mois de préavis + 12 mois de négociation) ne s’applique pas à un usage.