«Il y a déjà eu des malaises, mais jamais quatre décès en une campagne… C’est du jamais-vu», déclare Maxime Toubart, président du Syndicat général des vignerons de la Champagne (SGV).Archives Stéphanie Jayet

En moins de sept jours, quatre saisonniers ont succombé aux températures extrêmes dans la Marne. Une tragédie inédite, qui soulève des questions quant à l’organisation de la vendange en Champagne.

Voire les vidéos de France 2, BFM TV et de RMC sur le sujet, en bas de page…

LES FAITS

À VITRY-EN-PERTHOIS, le mardi 6 septembre, un vendangeur domicilié à Soissons et âgé de 45 ans est retrouvé inanimé dans les vignes.

À RILLY-LA-MONTAGNE, le vendredi 8 septembre, un jeune Rémois de 19 ans succombe à un arrêt cardiaque.

À CHAVOT-COURCOURT, un travailleur étranger, venu de Pologne, est décédé au milieu de ses équipiers.

À VERT-TOULON, une femme est retrouvée à son domicile, sans vie, après avoir été prise de malaise
dans les vignes.

DE MULTIPLES MALAISES ET INTERVENTIONS DES SECOURS ont été constatés cette année au cours de la vendange en Champagne.

La pluie tombée abondamment ce mardi après-midi dans la Marne n’a pas effacé les traces des fortes chaleurs qui ont éprouvé les vendangeurs la semaine passée.
 
En moins de sept jours, quatre saisonniers ont succombé aux températures extrêmes. « C’est dramatique, concède Maxime Toubart, président du Syndicat général des vignerons de la Champagne (SGV). Les vignerons sont habitués à travailler sous de fortes chaleurs, on sait faire. Mais on doit aussi préparer nos saisonniers. Des consignes sont délivrées à nos adhérents sur les bons gestes à adopter. Cela nous paraît évident, mais il faut les rappeler. Mettre une casquette, de la crème solaire, prendre des repas constituants, s’hydrater, faire des pauses… »
 
À savoir si de tels cas sont déjà survenus en Champagne, le président des vignerons répond par la négative : « Il y a déjà eu des malaises, mais jamais quatre décès en une campagne… C’est du jamais-vu. »

Lorsque nous sommes confrontés à des conditions extrêmes, les moyens déployés ne sont pas suffisants pour garantir la sécurité des saisonniers.


Philippe Cothenet, CGT Champagne

Le choc est d’autant plus grand au regard du profil des vendangeurs terrassés : un jeune Rémois âgé de 19 ans, décédé à Rilly-la-Montagne, un Soissonnais de 45 ans, trouvé inanimé par ses équipiers à Vitry-en-Perthois, une quinquagénaire de Vert-Toulon, retrouvée à son domicile après un malaise au vignoble, ainsi qu’un travailleur polonais de 45 ans, mort à Chavot-Courcourt.
 
Pour les équipes frappées par le drame, la reprise de l’activité est extrêmement difficile.
 
Interrogée par nos confrères de France-Bleu, la viticultrice qui employait le jeune de 19 ans, basée à Rilly-la-Montagne, se dit dévastée : « Je lui ai dit qu’il pouvait s’arrêter, il m’a répondu qu’il allait continuer. Donc je l’ai laissé. On leur a dit qu’il fallait boire, on leur fournit de l’eau, des bouteilles, des jerricans… Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, pourquoi il est tombé. ». Et de lâcher : « Si je ne l’avais pas embauché, serait encore là. »
 
Pour la CGT Champagne, un travail de fond est à mener avec l’interprofession champenoise pour définir un cadre strict en cas de fortes chaleurs. « On a vu des maisons mettre en place des barnums à la vigne, afin de se reposer à l’ombre, souligne Philippe Cothenet, secrétaire général adjoint de la CGT Champagne. Des glacières ont été mises à disposition de certaines structures, d’autres ont aménagé leurs horaires de travail… Il faut que ces mesures soient clairement définies dans nos textes. »
COUPER TOUJOURS PLUS, AU RISQUE DE SE METTRE DANS LE ROUGE
 
Alors que la vendange attire chaque année plus de 120 000 saisonniers en Champagne, dont près de 60 % venus de l’extérieur, Philippe Cothenet pointe les limites du système champenois. « Cela prouve que lorsque nous sommes confrontés à des conditions extrêmes, les moyens déployés ne sont pas suffisants pour que les saisonniers puissent travailler en toute sécurité , déclare le syndicaliste. Nous avons un système de vendange à la tâche, payé au kilo de raisin (ainsi qu’un système de vendange à l’heure, NDLR), qui incite à couper toujours plus, au risque de se mettre dans le rouge. Il faut une prise de conscience à tous les niveaux. Car ce ne sont sans doute pas les dernières vendanges chaudes que va connaître la Champagne. »
 
Si la pluie survenue ce mardi a permis une chute du thermomètre de l’ordre de 10ºC, un retour aux températures estivales est attendu en fin de semaine.

Note de l’Intersyndicat CGT du champagne :

Une délégation CGT a été reçue en urgence par le préfet le jeudi 14 septembre à 08h00 à la préfecture de Châlons-en-Champagne.

Sabine Dumesnil, secrétaire de l’Union départementale du 51 et Noël Sainzelle, représentant le l’intersyndical CGT du Champagne, ont évoqué le décès par arrêt cardiaque des 4 vendangeurs et la multiplication des campements sauvages type “bidonville” similaire à ceux de la jungle de Calais.

Concernant les 4 décès, ils ont rappelé au Préfet que le travail à la tâche incitait les gens faire des efforts considérables, préjudiciables à leur santé par ces temps de forte chaleur, pour réaliser leurs tâches.

Ils ont préconisé que des accords soient négociés au sein de la commission mixte viticole du SGV et la commission paritaire de l’UMC afin de prévoir des mesures organisationnelles spécifiques permettant la prise en compte du risque chaleur, comme l’adaptation des rythmes de travail, l’organisation des journées de travail (commencer plus tôt par exemple, pour éviter les fortes chaleurs de l’après-midi ), limiter les charges physiques, la mise à disposition d’eau potable et fraîche…

Concernant la multiplication des campements sauvages, ils ont préconisé de multiplier les contrôles de l’inspection du travail et de la gendarmerie, d’ordonner l’évacuation des hébergements sous tente accompagnées de mesures pour reloger dignement tous les saisonniers concernés. Ils ont également insisté sur le fait que le donneur d’ordre devait être tenu solidairement responsable en cas d’infractions commises par leur prestataire de services.

Certes, ils ont été écoutés, mais ont-ils entendu ?…

Une vendange historiquement  chaude en Champagne

Les premiers coups de sécateur ont eu lieu le 1 er septembre dans le vignoble champenois. Les saisonniers ont été confrontés, dès la semaine du 5 septembre, à de fortes chaleurs. Un pic a été enregistré le mardi 6 septembre, à plus de 35ºC dans la Marne selon le Comité Champagne. « Ce qui est le plus marquant, au cours de cette vendange, c’est la longueur de cette période de chaleur, avec dix jours de températures au-dessus de la normale, indique Sébastien Debuisson, directeur technique du Comité Champagne. L’an dernier, nous avons eu trois ou quatre jours de chaud, puis la température est redescendue. En 2020, il faisait bien plus chaud en septembre, mais nous avions vendangé en août. Il est encore un peu tôt pour tirer un bilan global, mais une période de chaleur aussi longue en vendange, c’est inédit. »

LES AUTRES POINTS 

 

Deux décès  de vendangeurs  dans le Beaujolais 

La Champagne n’est pas la seule appellation endeuillée par le décès de saisonniers. Selon nos confrères du Progrès, un vendangeur a également été retrouvé sans vie, jeudi 7 septembre, au sud du Beaujolais. « L’homme, âgé d’une soixantaine d’années, a d’abord commencé à se sentir mal. Puis, il aurait fait un malaise cardiaque, avant de décéder » relatent nos confrères. Un second vendangeur avait également été découvert le long des vignes, deux jours plus tôt, toujours dans le Beaujolais.
 

Les recommandations de l’inspection du travail

Contactée, l’inspection du travail indique que « les employeurs sont tenus de prendre des mesures spécifiques, telles que : la mise en place de mesures organisationnelles permettant la prise en compte du risque chaleur, comme l’adaptation des rythmes de travail, l’organisation des journées de travail (commencer plus tôt par exemple, pour éviter les fortes chaleurs de l’après-midi ou augmenter les pauses), limiter les charges physiques, la mise à disposition d’eau potable et fraîche et la fourniture aux salariés des moyens de protection contre les fortes chaleurs et/ou de rafraîchissement. »

Maxime Toubart, Président du syndicat général des vignerons, complètement à côté de la plaque ! Ses propos ne sont pas dignes d'un Président de syndicat...